« Nous
savons depuis l’écroulement du IIIe
Reich, que les
responsables de ces crimes
ont eu soin de brouiller leurs traces, d'effacer
les actes qu’ils avaient commis. Il
y avait une volonté de cacher ce
qu’ils faisaient. Non pas que cela fût secret, c’était visible
partout, mais ils voulaient cacher les traces. Comme tout criminel,
ils ont eu le soin de ne pas laisser de preuves derrière eux. (…)
Il s'agit d'une « volonté
métaphysique » de faire disparaître, non pas seulement les
traces du crime, mais les victimes du crime ». (Père
Desbois, président de Yahad in-Unum).
Yahad
in-Unum est une association française, cofondée à Paris en 2004
par des cardinaux et des rabbins dont Jean-Marie Lustiger et Israël
Singer. Elle est devenue depuis une organisation internationale
présidée par le Père Desbois, prêtre
catholique
spécialisé dans les relations de l’Église avec le judaïsme. Dès
2005, lui était
décerné par l'International
Council of Christians and Jews (ICCJ)
la
médaille de l’amitié judéo-chrétienne (Yahad,
en hébreu veut dire ''ensemble'', in-Unum en latin signifie
''uni''). De
nombreuses autres récompenses et prix scientifiques prestigieux ont
suivi.
Shoah
par balles :
«
le prototype des génocides modernes »
Le
but de l'association est de retrouver en Europe de l'Est les sites
d’exécution des Juifs et des Tziganes, fusillés en masse entre
1941 et 1944 par les unités nazies appelées Einsatzgruppen
(Shoah par balles). Ces massacres méconnus, perpétrés en dehors
des camps d’extermination, sont pour Yahad in-Unum « le
prototype des génocides modernes comme ceux du Cambodge, du Rwanda,
du Darfour, dans les Balkans et en Syrie, qui ont reproduit les mêmes
procédés systématiques. « Nous travaillons à faire
prendre conscience au monde de la nécessité de reconnaître et de
dénoncer l’épidémie des génocides en cours ».
Le
grand public a découvert Yahad in-Unum à l'occasion d'une émission
de télévision (Pièces à
conviction) dans laquelle un
documentaire intitulé "Shoah
par balles – l'histoire oubliée",
était diffusé en prime time (France 3, 12 mars 2008). Ce
documentaire de Romain Icard montrait
les travaux d'exhumation
des fosses
communes ukrainiennes
par l'équipe du
père Desbois. On y insiste sur cette
« autre réalité du massacre, un génocide sans camp, sans
chambre à gaz » (Elise Lucet,
journaliste), alors qu'une conversation
passionnante entre le père Desbois et Simone Veil s'engageait sur
cette part
d'ombre de la Shoah, délaissée
semble-t-il par les historiens. Même
Erwan Desplanques de Télérama titrait sur « un oubli
historique majeur » alors que Olivier Zilbertin, dans le
supplément télé du journal Le Monde, parlait d'un « holocauste
longtemps tu (…) qui aurait
pu se perdre dans l'oubli, enseveli pour toujours ».
Quelques
historiens s'émurent
d'une ''vulgarisation sensationnaliste''
dans la revue Vingtième
siècle (2009/2,
n°102), rappelant que d'importants travaux déjà anciens s'étaient
intéressés à la question des fusillades massives, en particulier
à Babi Yar,
en Ukraine, lieu
du massacre de 33 771 juifs de Kiev en septembre 1941. Chacun
aujourd'hui s'accorde à dire que le travail mémoriel de
l'association complète et enrichit le travail des historiens,
d'autant que les indispensables archives
soviétiques longtemps inaccessibles sont
devenues assez récemment une
source majeure dans les recherches sur la Shoah par balles.
C'est
pourquoi les méthodes
d'investigations
engagées
par Yahad, en collaboration avec les chercheurs du CNRS et
du Mémorial de l'Holocauste à Washington,
n'ont cessé d'être
affinées et expliquées. Un
postulat toutefois est nécessaire :
il existe une
archéologie
de la mémoire, il faut agir
sur celle-ci,
c'est à dire interroger les derniers témoins avant qu'ils ne
disparaissent. L’histoire est nôtre, elle ne relève pas
seulement d'une étude élaborée qui compulse, analyse et archive le
passé.
(...)
(...)
Enquêter
sur ces crimes méconnus et parfois
contestés, en prouver l'existence
par les preuves et les témoignages,
repérer les
lieux, les
identifier, les
préserver et construire des mémoriaux,
documenter et largement
diffuser les résultats de ce travail de terrain, « pour
rendre hommage à la mémoire des
victimes », voilà l'objectif
premier de cette remarquable association qui éclaire
autant sur le passé que sur notre monde actuel et
« répond aux négationnistes
d'aujourd'hui et de demain. » (Yahadinunum.org)
Pour
ce faire, le
comité scientifique de l'organisation est composé de 25
universitaires de renom dont Nicolas Werth (spécialiste de la Russie
soviétique et membre de l'IHTP -Institut d'histoire du temps
présent), Paul Shapiro (président du U.S.
Holocaust Memorial Museum
de
Washington),
Serge Klarsfeld, Denis Peschanski et
Danielle Rozenberg (du
CNRS),
Stéphane
Grimaldi (directeur
général du Mémorial de Caen). Documentation,
archives et vidéos
sont consultables (sur rendez-vous) au Centre
Européen de Ressources pour la Recherche et l’Enseignement sur la
Shoah à l’Est (CERRESE)
situé au 114
bd de Magenta, Paris 10ème).
L’université
Paris-Sorbonne et l’Université de Georgetown sont des partenaires
académiques de l’organisation qui
propose un programme académique (colloques
et séminaires),
et
collabore
étroitement avec l’United States Holocaust Memorial Museum.
(...)
Plaque
commémorative sur un site d'exécution du district de Jytomyr
(Ukraine)
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