Maaloula, village plus que jamais chrétien



Perché à 1650 mètres, dans la région de Qalamoun en Syrie, Maaloula est un village de 5000 habitants, principalement peuplé de chrétiens grecs-melkites (catholiques) et grecs orthodoxes. L'araméen y est encore parlé.
Chargé de superstition et d'histoire, Maaloula a toujours été un lieu de passage (entre Damas et Alep), de rencontre (entre Orient et Occident) et de dialogue (entre chrétiens et musulmans). Imprégné d'une identité féroce faite de résistance, et de compromis, c'est aussi un enjeu de pouvoir pour le régime de Bachar al-Assad, un enjeu patrimonial et culturel pour le monde.
Le village a été occupé et dévasté par les islamistes entre septembre 2013 et avril 2014. Avec la fin des combats à Alep Est en décembre 2016, et l'espoir d'une issue prochaine du conflit, Maaloula est, plus que jamais, la clé symbolique d'un pays à reconstruire.

Huit mois d'occupation islamiste
Quand le village est tombé, sans résistance, aux mains des rebelles du mouvement Jabhat al-Nusra lié à al-Qaïda, la population non armée a été forcée de crier "Allah akbar". La plupart ont fui. Certains ont été pris en otage, dont douze religieuses. D'autres furent froidement exécutés.
Aujourd'hui, « la ville martyre panse ses plaies » (Aleteia, 30 septembre 2015).
Les traces de destruction sont encore visibles parmi les petites maisons blotties dans les ruelles tortueuses et étroites tout contre les églises, couvents et monastères, et les grottes miraculeuses.
« Ces djihadistes y ont commis un véritable massacre archéologique, pillant l’église conventuelle du monastère Saint-Serge, un des plus vieux édifices chrétiens du monde (début du 4 ème siècle), et détruisant des icônes exceptionnelles. » (L’œuvre d’Orient, 14 septembre 2016). Le couvent Sainte-Thècle a été profané. L’incendie de la bibliothèque a détruit des manuscrits très anciens. Mosaïques et fresques ont été martelées, les icônes lacérées, les statues détruites. « La haine anti-chrétienne est flagrante.  Partout des ruines, maisons brûlées, traces de tirs d’obus, de bombardements, de roquettes (…). La violence inouïe des combats apparaît clairement. »

Mais le pire traumatisme n'est pas là. 
Ce qui a été vécu par les chrétiens de Maaloula comme une trahison vient surtout du fait que « des musulmans sunnites, vivant en paix au milieu d’eux, ont accueilli les islamistes comme des libérateurs ! » (NovoPress, 14 septembre 2014). Pour surmonter l'épreuve, les habitants de Maaloula devront retrouver un climat de confiance et de sérénité car « ces premiers témoins du lien qui unit le judaïsme au christianisme (…) [sont les] victimes innocentes et désarmées d'une tentative d'extermination culturelle » (Roger Cukierman, Figaro Vox, 15 mai 2015).
Attaquer ce village mythique, et détruire le passé qui l'accompagne, c'est vouloir réduire à néant tout un monde, comme s'il n'avait jamais existé.
De nombreuses associations internationales s'y rendent désormais régulièrement pour évaluer les dégâts et les pillages, recueillir les témoignages, reconstruire ce qui a été détruit et retrouver ce qui a été volé. Le Père Toufic Eid, curé grec-melkite de l'église Saint-Georges, raconte : « Nous avons célébré la messe dans les débris de l’église, qui avait été brûlée et bombardée. Nous avions une simple table, dans la poussière. C’était une messe de recommencement. Après cela, tout le monde a senti que la vie était à nouveau possible ».

Une identité féroce faite de résistance, et de compromis
Les troubles et heurts ne sont pas nouveaux dans la région qui fut longtemps livrée à une insécurité et une anarchie récurrentes.

En octobre 1850 par exemple, le village se révolte contre le pouvoir central turc qui y rétablit l’ordre par la violence. Les sanctuaires chrétiens sont saccagés et pillés. Il y a environ 1500 tués. 
Icônes de Maaloula martelées par les djihadistes, cliché Putniknews.com.